Le Pont Mirabeau, Apollinaire

Le temps fuit

 

« Je suis partisan acharné d’exclure l’intervention de l’intelligence, c’est-à-dire de la philosophie et de la logique dans les manifestations de l’art. L’art doit avoir pour fondement la sincérité de l’émotion et la spontanéité de l’expression : l’une et l’autre sont en relation directe avec la vie qu’elles s’efforcent de magnifier esthétiquement ». Apollinaire

 

Longtemps considéré comme un génie fantaisiste et mystificateur, Apollinaire devient rapidement une figure importante de l’avant-garde artistique parisienne du début du XXe siècle. Précurseur du surréalisme, il a su se libérer de l’hermétisme des symbolistes dont il est l’héritier et s’éloigner des écoles, pour dire, avec une simplicité apparente et des mots de tous les jours ses émotions, ses désirs, ses regrets; de la nature, il dit qu’elle est pour lui « une source pure à laquelle on peut boire sans crainte de s’empoisonner ».

 

Ami d’artistes majeurs et de peintres – Picasso, Braque, Matisse, le Douanier Rousseau parmi d’autres, il rencontre Marie Laurencin, peintre et muse des artistes avec laquelle il vivra une liaison orageuse. Après plusieurs années de scènes et de reproches elle ne supporte plus ses infidélités et le quitte en 1912. « Souviens-toi que je t’attends », lui avait-il alors écrit. Apollinaire songeant à sa rupture avec elle écrit Le pont Mirabeau ; c’est ce pont qui le menait chez elle et qui demeure désormais désert, ne menant plus nulle part; alors que le temps, semblable à l’eau qui s’en va, comme l’amour, fuit.

 

« Le Pont Mirabeau » est extrait du recueil Alcools, son chef d’oeuvre paru en 1913. Apollinaire s’engage dans la Grande Guerre dès son début. Gravement blessé à la tête, touché par une épidémie de grippe espagnole, il meurt en 1918.